C'est la Russie qui a remporté le 53e concours de l'Eurovision. Le candidat français, Sébastien Tellier, se retrouve dans les limbes du classement (18e sur 25, ex aequo avec la Suède). L'interprète de "Divine" a été desservi par une réalisation catastrophique, qui a été incapable de correctement filmer sa mise en scène décalée (une arrivée en voiturette de golf, notamment).
Sebastien Tellier - Eurovision 2008 [Divine] France
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C’est Sebastien Tellier, chanteur electro-pop au penchant avéré pour les costumes couleur crème, à la croisée entre Chabal et Raël, qui nous a représenté, après avoir emporté l’investiture lors du traditionnel concours télévisé de sélection sur France 3. La chanson choisie, Divine, est une petite bombe joyeuse très electro-pop justement (voir le clip ci-dessus). Mais quand on constate qu’en face, on a un Chikilicuatre Espagnol, voire Dustin, une dinde qui braille sur de la techno pour représenter l’Irlande (je ne plaisante pas…), on est quand même en droit de se demander qu’est ce que Tellier est allé foutre dans ce bourbier… On peut imaginer que le côté kitch du programme couplé à la mission divine (je sais…) de représenter la France devant l’Europe des ménagères de moins de 50 ans, ont su exciter le bonhomme, peut-être en mal de reconnaissance par le grand public en France…
Enfin, toujours est-il qu’en terme de visibilité au moins, il en aura tiré quelque chose. Car, ce qu’il y a de bien en France, c’est que lorsqu’il s’agit de musique, on a toujours un député UMP pour la ramener. On avait eu François Grosdidier, qui avait eu la brillantissime idée au lendemain des émeutes de l’automne 2005, de présenter un texte de loi visant à condamner des rappeurs comme Monsieur R, ou des groupes comme 113, Lunatic ou encore Minister Amer (tous deux déjà dissous à l’époque, trop fort le Grosdidier) pour certains propos amers envers la France allant même jusqu’à dire de ceux-ci “cela conditionne et c’est ce qui fait passer à l’acte”. On en rigole encore… Cette fois, le problème est de nature différente pour François-Michel Gonnot qui se plaint comme c’est pas permis:
“Nombre de sociétés imposent l’anglais comme langue de travail à la place du français, la Commission européenne vient de supprimer le français de ses publications statistiques, et le summum vient d’être atteint avec le 53 ème concours Eurovision de la chanson où notre pays sera représenté par une chanson …en langue anglaise, « Divine », du chanteur français Sébastien Tellier”
Franchement on croit rêver… On a donc des députés qui n’ont rien d’autre à foutre que de se pencher sur le fait que la chanson qui représentera la France sera interprétée en anglais. Alors oui, c’est une première pour la France… Et alors? Même si ce n’était pas du tout le but, on peut au moins arguer que pour une fois, on aurait fait un effort pour se faire comprendre par nos voisins. Et puis dans le fond, en français, en anglais ou en moldave, faut pas déconner, il n’y a rien de gratifiant à gagner l’Eurovision… Enfin, toujours est-il qu’au final, les Anglais se foutent bien de notre tronche, car comme le souligne Henry Samuel, le correspond du journal anglais The Telegraph :
“Divine aura provoqué la controverse dans un pays sensible en ce qui concerne l’empiétement de la culture anglo-américaine sur sa langue et son art”
Mais le plus notable, est ce qui se passe au sein même de la scène musicale française, comme le souligne Sébastien Davet, dans un article tres instructif (Le Monde, 13 avril 2008) : « […] c’est un fait : le rock français chante de plus en plus et de mieux en mieux en anglais. » Davet nous cite quelques artistes sans complexes : « The Do, Cocoon, Moriarty, Syd Matters, HushPuppies, Soko, Fancy... » et ceux qui avaient ouvert la voie avec la french touch techno (Daft Punk, Air, David Guetta, Justice ou Martin Solveig) .
The Do
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Le fait est que si The Do, Scenario Rock (précurseurs de fusion disco-électro–rock) ou Solveig font une carrière internationale, c’est parce qu’ils chantent en anglais et que si des groupes géniaux et innovants comme Noir Désir ne sont connus que dans quelques pays limitrophes (Litfiba en Italie s’était inspiré du style des Bordelais) et que par quelques fans du genre, c’est parce qu’ils chantaient plutôt en français.
Bon, que des groupes chantent en anglais, ce n’est pas nouveau ni honteux en soi, mais c’est surtout un certain état d’esprit qui est nouveau. Ecoutez plutôt, toujours tiré de l’article de Davet : «[…] Pas simple pourtant pour ce type d’artistes de s’imposer, alors que des quotas de 40 % de chansons francophones sont imposés, depuis 1986, dans les radios en France. « Nous rentrons en concurrence avec tout le répertoire anglo-saxon, regrette-t-il. Cela nous ferme presque totalement les portes des radios.» […]». Encore un peu et on sortirait nos mouchoirs. On croit vraiment rêver ! La langue française est menacée jusque dans son fief et on regrette les quotas ! Mais heureusement que ces quotas existent. Sinon, on en serait à la situation qui prévaut en Belgique, où aucun groupe de rock digne de ce nom ne chante plus dans sa langue natale (dEUS, Hoverphonics et Girls in Hawaii pour les plus connus).
www.myspace.com/telliersebastien
www.sebastientellier.com/
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