dimanche 9 mars 2008

Chrome Hoof - Quand Tex Avery fait du funk et du metal !

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Opéra hardrock ? Performance artistico-médiévale ? Terrorisme musical ? Machine à faire entrer en transe ? Difficile de définir le projet défendu par les frérots Leo et Milo et leur bande, qui nous en mettent plein les tympans et les mirettes. En découvrant les influences de Chrome Hoof, à savoir Slayer et Black Sabbath, on s'attend à des riffs chauffés à blanc, un batteur martelant violemment ses fûts et un chanteur chevelu et barbu hurlant comme un enragé. Au lieu de ça, on se retrouve face à une dizaine de guignols habillés en peignoirs façon aluminium. Les Londoniens ne sont pas sur la Lune, ils sont sur une autre planète pas encore découverte mais on n’a rien vu de tels depuis les plus beaux délires visuels de Funkadelic ou Parliament, tout droit sortie d’une série de science-fiction des années 70.
C'est le projet disco funk metal de Leo Smee, le bassiste du groupe doom Cathedral (si, si, vous lisez bien !). Originalement bâti autour d'un duo avec son frère Milo, Chrome Hoof, s'est finalement transformé en orchestre pour moines futuristes allumés et funky. Le binôme s’est fixé pour mission de s'affranchir des dogmes metal, de brouiller les pistes entre des genres musicaux a priori disparates. Une sorte de cirque Barnum au carrefour improbable entre Sunn O))) et Parliament, Magma et ESG, Black Sabbath et Tex Avery, Hawkwind et Daft Punk.

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Une bande de joyeux jobards accoutrés de toges à paillettes parmi lesquels on trouve la siphonné Lola Olafisoye des excellents Spektrum. Pas moins d'une vingtaine de musiciens donc, trompettes, saxophones, tubas, percussions diverses et bien sûr basse, guitare, batterie, mais aussi synthétiseurs et effets électroniques analogiques pour un Pre-Emptive False Rapture complètement halluciné tentant follement l'hybridation du jazz mutant et futuriste de Sun Ra avec les B.O. bizarres des Italiens de Goblin, le punk funk d'ESG, le P-funk de Parliament Funkadelic et le hard rock mystique de Black Sabbath. D'un humour constant, leur musique résulte de cette approche limitrophe, quasi-schizophrénique dans sa démultiplication bluffante des styles, tout en ruptures de tons abrupts, en excitants méandres progressifs et en choeurs baroques, jamais avare de sections rythmiques complexes, de louvoiements alien-jazz à la Sun Ra et de scintillements electrofunk. On croit entendre une symphonie martienne savamment démantibulée ? Fausse piste, l'orchestration est brisée la seconde d'après par une tornade doom-metal, qui raccroche aussi subitement le wagon disco avec une aisance et une jubilation tellement palpable qu'elle ne s'enferre jamais dans le ridicule ni le kitsch ampoulé auxquels elle pourrait s'exposer, ce qui est en soit un miracle. N'est pas l'orchestre du Splendid qui veut.
“Pre-Emptive False Rapture” est une sorte d’odyssée (de l'espace) pleine de bravoure, de moments d’héroïsme, de musiques venues d’une autre époque, d’un autre monde qu’on imagine pas très beau à voir, mais sûrement intéressant à visiter. Les fans de Mike Patton devraient trouver ici leur bonheur tant le brassage est innovant. Dès les premières notes lancées, la machine est en route, et tout ce que Chrome Hoof nous fait traverser ne semble avoir de lien avec ce qui vient de se passer, ni avec ce qui va se passer. Les ambiances psychédéliques et très brumeuses donnent le ton à des tirades de schizophrénie furieuse, des gouffres effrayants, des évolutions aux rythmiques funky obsédantes ou encore des passages rock très entraînants et légers. La musique de Chrome Hoof ondule bêtement (au bon sens du terme), de références en références, d’instruments en instruments (synthé, cuivres, guitare, basse, et bien d’autres) générant un vortex dont la compréhension même n’a plus forcément grand sens au final. Tour à tour grand huit et train fantôme, vaudeville et film d'horreur, rugissements doom et vélocité disco-funk .

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Impossible de savoir ce qu’il va se passer de chanson en chanson, ou même de riff en riff, sur cet album. On commence en grandes pompes avec une introduction inquiétante ("Nordic Curse") pour enchaîner sur du funk délirant digne de Parliament ou des tous premiers Red Hot Chili Peppers ("Tonyte"). La voix n’arrive qu’après de longs instants (très dansants, cela dit), alors qu’on se demandait presque si l’album n’allait pas être entièrement instrumental.
L’album de cette troupe de musiciens, chanteurs et danseurs costumés fait s’alterner des morceaux speedés et rythmés (le tonic “Tonyte”), invite des cuivres hystériques (“Circus 9000”), nous plonge dans de sanglantes épopées (“Moss Covered Obelisk”). Chrome Hoof, c'est comme un hommage à l'ambiance des années 70, entre Funkadelic et Iron Maiden. Autant métal que funk, pas plus électro que mathrock, les morceaux sont construits sur des structures rythmiques déroutantes et ne seraient pas dépareillés dans The Rocky Horror Picture Show. On enchaîne avec des gros riffs lourds à la Black Sabbath agrémentés de synthés ou orgues, voire de cuivres bien gras, mêlés à des ambiances planantes ou déprimantes. Inutile sans doute de décrire l’album pas à pas, tant la description in extenso noircirait des pages illisibles.
Plébiscité aussi bien par les kids enamourés de Justice et Klaxons (avec qui ils ont dernièrement partagé l'affiche) que par les mélomanes assoiffés de musiques aventureuses et les metalleux purs et durs. Il faut dire que visuellement, l'orchestre mastodonte met le paquet. Spectacle à part entière, qualifié d' « electro doom space ritual », Chrome Hoof est attifé sur scène de toges à paillettes et de masques médiévaux futuristes, entourés d'une armada de danseurs, d'une chanteuse glam (Lola Olafisoye, intermittente du groupe Spektrum) et d'une garnison de mages-musiciens, cuivres et cordes tendus, prêts à en découdre avec leurs amplis. Cerise sur le gâteau, une immense créature démoniaque surgirait parfois dans la salle... On n'avait pas vu un tel déchaînement visuel et sonore depuis les bacchanales industrielles de Crash Worship ou les shows graveleux des Butthole Surfers. A interpréter ses cabrioles musicales spectaculaires, Chrome Hoof fait l’effet de n’appartenir à rien, ni au passé, ni au présent, encore moins au futur, ni à une scène particulière. Encore une fois, peu importe de toute manière, Chrome Hoof intéressera qui voudra bien s’y intéresser, a priori des gens plutôt ouverts à toutes les musiques expérimentales, des curieux naïfs, et autres allumés de la consommation musicale. "pre emptive false rapture" est un disque impossible à noter, encore que son résultat défile sans accrocs et soit interprété sans failles, pour la simple et bonne raison qu’il s’inscrit dans tout et rien à la fois, que tout référentiel qui pourrait le régir est aussitôt brouillé après réflexion, et si vous êtes curieux donc, n’hésitez pas.

Voici quelques extraits de concerts glanés sur youtube, helas il n'existe pas encore de clip officiel, juste pour l'ambiance....





Chrome Hoof At ATP 2008 3 video
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Album - Chrome Hoof - "Pre-emptive false rapture"

http://www.blogger.com/www.myspace.com/chromehoof
http://www.chromehoof.com/


Petit etat des lieux du Metal d'aujourd'hui.....

Dernièrement, ce milieu pourtant connu pour son conservatisme se laisse aller à quelques expériences. Les Norvégiens de Next Life associent sonorité de jeux vidéos et Death Metal. Les Américains de Sunn O))) font du metal au valium. Et le death metal électro de KILLL, un autre groupe norvégien, a des accents de free jazz.

Les membres de KILLL ne s’arrêtent pas à l’univers metal. Are, par exemple, est artiste plasticien. Erlend, le guitariste, a joué avec JR Ewing, un groupe pop. Matrin, le batteur, joue avec Jaga, un groupe de jazz. D’ailleurs, les instruments de Are ne sont pas tous spécifiquement metal. Certains sont utilisés par les DJs de musique trance. KILLL ne sort jamais d’albums. Pour les écouter, il faut aller au concert. Leur spectacle, à base de lumière stroboscopique, vaut d’ailleurs le déplacement. Le stroboscope est la marque de fabrique des concerts de KILLL. La lumière et la musique fonctionnent de manière interdépendante. Par exemple, quand le son est plus noisy, les couleurs deviennent plus vives. L’idée du groupe, c’est de créer son propre habillage acoustique et visuel, pour se démarquer des gesticulations sataniques des autres groupes de metal.

Les uns se shootent au speed, les autres marchent au valium. Le rock metal au ralenti de Sunn O))), un groupe californien, a un effet apaisant sur le rythme cardiaque. Ils font incontestablement partie de l’avant-garde du metal expérimental, et pas uniquement aux USA. Sur scène, Greg Anderson et Stephen O’Malley, les deux maîtres de cérémonie, portent des soutanes de moines. Et même lors des interviews, ils préférent ne pas être reconnus. D’une part parce qu’ils sont timides, d’autre part parce que le mystère fait partie de leur image de marque. Ils conçoivent leur musique comme un massage de la tête aux pieds.
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Un effet que Sunn O))) obtient en connectant des amplis en cascade et grâce à des fréquences basses et des techniques de distorsion. Le résultat s’appelle « Drone Metal » : un son profond qui se modifie progressivement. Le nom du groupe, Sunn O))), vient d’un modèle d’amplificateur des années 80. En live, Sunn O))) joue de préférence avec des amis musiciens. Par souci de cohérence visuelle, tout le monde est en soutane. C’est leur uniforme. L’attention du public doit se concentrer sur la musique.

Les uns s’amusent avec les ondes sonores, les autres préfèrent jouer à la playstation. Le duo Next Life se compose de Hai Nguyen, un fou d’informatique, et son copain Trond. Ils assemblent les sons d’anciens jeux vidéo avec du metal. Le résultat s’appelle du gameboy-deathmetal. Les concerts de Next Life sont un hommage inconditionnel et extatique au metal. Physiquement, c’est épuisant, et leurs spectacles ne durent jamais plus qu’un quart d’heure. Next Life utilise de préférence les bruitages des jeux vidéos d’avant 1995. L’éventail de sonorités est assez réduit et, surtout, les sons n’ont pas la netteté des jeux vidéo d’aujourd’hui.
Rassurez-vous, le fan de metal « old school » n’est pas mort. Mais le milieu s’ouvre enfin à d’autres sons. Et l’essentiel, c’est qu’on soit d’accord sur les fondamentaux. Que ce soit au ralenti ou en accéléré, avec la crinière ou la barbichette, les metallers ont tous un cœur de metal qui bat très fort.

Albums :

Electric Violence (2006) de Next Life
chez Cock Rock Disco.

Altar (2006) de Sunn O)))
chez Southern Lord



http://www.killl.org/
http://www.sunnborisaltar.com/
http://www.electricdungeon.org/

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